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lundi 8 août 2011

Jan Kopp

Jan Kopp, artiste allemand né en 1970, réalise des vidéos, des dessins animés, des installations.

Il expose actuellement à l'Abbaye de Maubuisson à Saint Ouen l'Aumône (Val d'Oise). L'installation "Le Jeu sans fin" est exposée dans la grange de l'abbaye.

Première impression en entrant, nous sommes saisi par le lieu d'exposition, ou ce qui est considéré comme le lieu d'exposition. Cette vaste grange médiévale, majestueuse et silencieuse, témoin des siècles passés, prend une large place par rapport à l'œuvre d'art, ou ce qui est considéré comme l'œuvre d'art.

Le doute plane tellement sur ce qu'est l'œuvre que le spectateur est invité à avancer par la médiatrice présente dans la grange.

On sait en effet, depuis Marcel Duchamp, que c'est le spectateur qui créé l'œuvre. Avançons donc, puisque nous sommes (considérés comme) spectateur, et admettons ce vaste ovale blanc surmonté de onze pendules de Foucault comme une œuvre d'art.

Des billes colorées sont posées sur une surface blanche ovale, en une constellation multicolore. Les pendules de Foucault viennent parfois choquer les billes et les déplacer.

Le temps qui passe est un des thèmes de l'installation. Cette œuvre est mouvante. Elle égrène le temps de façon immuable. C'est une métaphore du cosmos soumis aux lois de la gravitation. Nous sommes le créateur regardant l'univers qu'il a créé, en train d'évoluer selon des lois intangibles.


Jan Kopp
Exposition jusqu'au 01/10/2011
Abbaye de Maubuisson
avenue Richard de Tour
95310 Saint Ouen l'Aumône

lundi 1 août 2011

Le 59 Rivoli

Dans les années 2000, plusieurs squats artistiques existaient à Paris. Citons la Miroiterie, Alternation, le Miro, la Petite Roquette et le 59 Rivoli. Tous ont fermé sauf ce dernier, qui a été régularisé, racheté et rénové par la mairie de Paris.

Précisons que si les squats sont toujours ouverts pour des motifs économiques (pas d’accès à un logement), certains ont une composante supplémentaire, une composante artistique. Il s’agit de proposer des créations à travers des ateliers d’artistes.

Un ancien squatteur parisien, que j’ai rencontré, précise que l’objectif d’un squat n’est pas toujours d’être régularisé. « A partir du moment où l'histoire est lancée dans un lieu, à partir du moment où le processus est acquis pour l'institution, pour les services sociaux, la police, la justice, on va essayer de pérenniser, de construire des rapports institutionnels, de projets, d'associations, de subventions. Ou alors, on reste en autonomie, indépendant de tout regard institutionnel. »

Les riverains d’un squat artistique ont un regard qui évolue sur ce lieu. Ils voient le squat avec « effroi, aux premières semaines, puis avec curiosité, continue notre ancien squatteur. A l'heure du déjeuner, ils rentrent dans cet immeuble. Pendant toute une vie de travail, ils sont passés devant, ils auraient souhaiter le visiter et là ils le visitent, c'est une restitution, quelque part. »

Le 59 Rivoli a commencé à être squatté en novembre 1999 par trois amis, Kalex, Bruno et Gaspard Delanoë. En 2000, Bertrand Delanoë, lors de sa campagne pour la mairie de Paris, fait la promesse de légaliser ce lieu. L'ensemble du programme de rachat et de rénovation a été mené par la ville de Paris, jusqu’à la réouverture en 2009 comme lieu d’art, hébergeant des ateliers d’artistes, dans une ambiance de ruche, dans une ambiance d'essaim d'art où des gens de nationalités, d'origines, de sexes, de milieu social différents cohabitent.

Quelle est la place du 59 dans l’art actuel ? Gaspard Delanoë affirme qu’il s’agit vraiment d’un lieu alternatif. « Il n'y a pas d'autre lieu qui fonctionne comme cela, précise le fondateur du lieu, où ce sont les artistes eux-mêmes qui sont en charge de leurs ateliers, qui sont en charge des expositions, qui font l'accrochage, et qui sont directement en contact avec le public.»

Gaspard Delanoë fustige le système marchand de l’art. « Le milieu de l'art contemporain, c'est avant tout une compétition artistique. On est avec un petit galeriste, on essaye de lâcher le petit galeriste si on arrive à avoir un plus grand galeriste. C'est de la Formule 1, c'est de la compétition. C'est un système dans lequel le marché a un très fort pouvoir. Nous ne sommes pas du tout dans ce système là. Ce qui nous intéresse, c'est de permettre à tout un tas d'artistes de travailler et de montrer leur travail. »

Henri Lamy, peintre, est résident du 59 Rivoli. Il réalise de grandes peintures colorées, des portraits, avec des projections de peintures. Il a quelques contacts avec des galeries qui s’intéressent à lui. « J'ai des petits trucs qui s'organisent à droite à gauche ». Sur le prix de vente de ses toiles, il « n’a pas spécialement envie que cela se vende cher, mais [il a] envie que cela se vende pour continuer à en faire, continuer à bosser comme cela. »
Pour lui, le 59 Rivoli est « un lieu qui est ouvert à tous pour pouvoir créer, pour pouvoir montrer aussi son travail. C'est important, c'est une ambiance qui est particulière, vraiment sympathique. C'est à cheval entre le squat, où on peut faire tout ce qu'on veut mais la liberté de chacun s'arrête là ou commence celle des autres ; à cheval avec une galerie où tu vas pas péter de travers, sinon on te regarde mal ; à cheval avec une biennale ou une foire où il y a trop de monde et où on s'y perd. Il y a un nombre constant d'artistes dont la moitié est périodiquement renouvelée, dont moi. Cela fait qu'il y a tout le temps des choses différentes à voir et en même temps, c'est pas le bordel non plus, on sait qui est là, c'est bien. Je ne vois que des avantages à cet endroit. »

Le 59 Rivoli est un lieu original dans le monde de l’art contemporain, une faille dans le système, où souffle un vent de liberté.

Quand nous visitons ce lieu, ayons bien conscience de notre privilège.


Le 59 Rivoli
59, rue de Rivoli
75001 Paris
http://59rivoli.org

Henry Lamy : www.henrilamy.fr