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samedi 3 mars 2012

Sereirrof

Sereirrof, artiste peintre, expose actuellement à la galerie Schwab Beaubourg à Paris. Il montre, si c'était encore nécessaire, qu’une œuvre d'art mal finie, pas belle, permet une interprétation beaucoup plus ouverte et profonde de la part du spectateur. L’artiste expose des peintures à l’huile représentant des personnages, dans des environnements terriens et vibrants. Chaque tableau, avec son unité de ton, est une variation de gris colorés. Les sujets sont traités en grosses touches de peinture. Les personnages nous regardent gravement, et une connexion s’établit entre eux et nous.

« Salauds de pauvres 2 » (200 * 160 cm) est une toile avec deux personnages debout, grandeur nature. Nous croyons voir un homme et une femme aux cheveux blancs. Leurs vêtements semblent être des guenilles. Dans ce tableau, tout est « mal fichu » (au sens noble du terme, contrairement à un tableau bien fini et bien gentil). La peinture en grosse touche est « mal fichue ». Cela rend la toile difficile, profonde et réelle.

Avec « Salauds de pauvres 1 » (200 * 160 cm), nous voyons un homme et un enfant. L’homme nous regarde dans une attitude de tension, le poing fermé, la bouche et les yeux interrogateurs, presque menaçants. « Que faites-vous là ? », semble dire la toile au spectateur. « N’avez-vous pas autre chose à regarder ? Il y a tellement d’autres expositions plus simples, plus gaies, plus
faciles ».

« Salauds de pauvres 8 » (116 * 89 cm) est un personnage aux cheveux longs et hirsutes. Hirsutes comme les grosses touches de peinture. L'homme semble nous regarder, mais en est-on vraiment sûr ? Nous ne voyons pas ses yeux, il y a juste une ombre à leur place.

« Lazare » (110*110 cm) est un homme nu, assis dans une lumière terreuse. Nous distinguons mal son visage. D’ailleurs, en a-t-il un ? Il a une main levée comme pour nous implorer. Qui implorer d’autre que le spectateur, pour lui qui semble si seul dans sa toile ?

Les œuvres de Sereirrof s’adressent à nous d’un regard, sans parler. Les personnages sont coincés dans leurs univers de terres, d’ocres, de lumières blafardes. Ces toiles sont pauvres, pauvres des couleurs, pauvres des concepts artistiques. Mais elles ont une richesse intérieure. Elles sont remplies de sentiments, d’humanité. Le dessin non fini laisse voir l’intérieur, la vraie profondeur des personnages.


Edouard Schwab, gérant de la galerie Schwab Beaubourg, a bien voulu répondre à nos questions. Nous l’en remercions.


Comment choisissez-vous les artistes et les œuvres que vous exposez ?

« C’est une galerie toute nouvelle, inaugurée il y a huit mois. Au début, nous avons choisi nos artistes par le biais d’Internet. Nous avons passé en revue des milliers d’artistes sur différents sites, sur des galeries virtuelles. Nous avons choisi nos artistes en fonction de nos goûts : lorsque nous voyions des visuels qui nous plaisaient, nous essayions d’en savoir plus, de confirmer notre premier choix en rencontrant l’artiste, de visiter son atelier, et, si possible, de l’exposer.
Aujourd’hui, nous avons une identité, une ligne directrice qui se porte sur deux courants : l’abstraction lyrique et l’expressionnisme. Nous choisissons les artistes par rapport à ces deux courants. Le critère numéro un restant que leurs travaux nous plaisent. Nous mettons un point d’honneur à mettre en avant des artistes qui nous plaisent.


Combien faites-vous d’expositions par an ?

« Cela tourne entre huit et dix expositions, dont deux collectives. C’est encore en train de se mettre sur les rails.


Est-ce que vous participez aux foires et aux salons d’art ?

« C’est un objectif de la galerie. On ne peut pas faire tout et n’importe quoi. Il y a les très grandes foires qui sont encore inaccessibles pour nous. Il y a aussi des foires considérées dans le milieu comme étant bas de gamme : je pense qu’il ne faut pas qu’on y participe. Si on veut se donner l’image d’une galerie qui a une activité pérenne et qui veut vraiment s’implanter dans le marché de l’art, il y a certains salons à éviter.
Pour ce qui est des autres salons, le problème de l’ancienneté va se poser. Beaucoup de foires n’acceptent pas de galeries qui ont huit ou douze mois d’ancienneté. Il faut connaître les bonnes personnes, les rencontrer, essayer de faire du lobbying auprès des personnes qui font partie des comités de sélection.


Subissez-vous les effets de la crise économique ? A-t-elle une influence sur le type de clientèle que vous avez ?

« Comme je vous ai dit, c’est une galerie toute nouvelle. Il y a huit mois, nous étions déjà en pleine crise. Nous n’avons pas vu l’avant crise dans notre activité. Apparemment, les classes moyennes achètent moins. Pour les classes plus aisées, ce n’est pas un problème, d’autant plus que nos artistes sont très abordables pour cette classe là.
Le marché de l’art n’a pas vraiment connu la crise. Les grandes galeries continuent de faire des chiffres d’affaires mirobolants, et beaucoup de petites galeries ferment. Il faut donc avoir les reins solides, être patient et ne pas passer à coté de certaines opportunités. C’est aussi une année d’élection. Beaucoup de personnes attendent de savoir quelles seront les résultats de l’élection avant d’investir.



Exposition Sereirrof jusqu'au 24 mars 2012

Galerie Schwab Beaubourg
35, rue Quincampoix
75004 Paris
www.galerieschwabbeaubourg.com

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