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dimanche 30 décembre 2012

Laura Henno


Laura Henno présente ses photographies à la galerie Les filles du calvaire à Paris. Laura Henno montre des jeunes perdus dans des paysages trop grands pour eux. Elle a photographié les résidents d’un centre médico-psychologique à Dunkerque. Elle a mis en scène des jeunes migrants à Calais ainsi qu’à l’île de la Réunion. 

Avec « Flanders » (2009), une jeune femme se tient debout dans une nature de broussailles. Elle regarde au loin, les yeux plissés. Les tons sont pastels, la végétation est jaune, le ciel pâle. Tout semble hésitant dans cette œuvre à commencer par la femme qui ne sait pas où aller. 

« Léon » (2009) est un garçon vu de dos, accroupi dans l’ombre de la végétation. En arrière-plan, le paysage est dans la lumière, flou, inaccessible. Le garçon osera-t-il se lever et avancer ? Il y a une interrogation, une tension dans cette image très graphique avec la trame des feuilles qui se détache sur le fond clair.

Dans la série Calais, « Untitled » (2012) montre des jeunes hommes se cachant derrière un talus. Leurs silhouettes se détachent sur le ciel jaune. A droite de la photographie, là où se dirigent leurs regards, une fumée vient vers eux. Ou est-ce un nuage ? C’est une photographie dramatique. Les personnages semblent immobiles, attendant le moment propice pour bondir et courir.



Entretien avec Laura Henno : 


Nicolas Goulette : Vos photographies sont très structurées, construites de façon stricte, presque minimaliste, avec des personnages sous tension, sous la contrainte des paysages. Est-ce vous cherchez toujours des tensions et des contraintes ? 

Laura Henno : Oui je cherche toujours à mettre en place un rapport de tension dans l’image. En tous cas, que l’image soit sous tension et qu’elle puisse happer aussi les personnes qui la regardent. Cette tension est assez subtile à mettre en place parce que ce sont des images très minimales. Je ne suis pas dans des mises en scènes très sophistiquées. Cela vient aussi beaucoup des gens que je photographie, qui sont eux-mêmes un peu angoissés. 

Vos photographies montrent des paysages qui dépassent l’humain, des terres vierges de toute modernité qui font penser aux arts premiers. Est-ce que les arts premiers sont des références artistiques pour vous ? 

Qu’est-ce que vous entendez par les arts premiers précisément ? 

Les statuettes africaines, par exemple. 

Ce n’est pas du tout une référence que j’ai. Il y a effectivement des choses qui sont assez sculpturales, des personnages qui sont très statiques. Mais non, ce n’est pas du tout une référence. 

Je trouve que vos photographies pourraient être journalistiques. Est-ce que vous avez envie de faire de la photographie pour le journalisme ? 

Non, pas du tout. Je ne me situe pas dans cet aspect de journaliste parce que je suis dans une démarche de mise en scène, qui prend du temps. Je ne me vois pas dans une démarche journalistique. Elle peut nourrir mon travail, mais je suis vraiment dans un parti-pris fictionnel, qui part du réel, qui peut documenter une situation, mais je ne suis pas dans la documentation. Je suis dans un positionnement par rapport à une situation que je vais mettre en avant. 

Pour vous qui vous intéressez aux migrants, est-ce que l’expression artistique est une forme d’errance, une forme de voyage, une promesse d’avenir meilleur ? 

Non, ce n’est pas du tout comme cela que je le vois. Ce n’est pas du tout une forme d’errance. C’est de la recherche. Cela peut être intuitif, mais c’est très pensé. En même temps, il y a des déplacements qui m’amènent à m’intéresser à des sujets qui étaient inattendus. Ce travail sur la migration, c’est parce que je suis allé à Rome, c’est parce que je suis allé à la Réunion. Ce n’était pas des choses qui étaient prévues. Je suis ouverte à ce qu’il se passe autour de moi, mais je n’ai pas le sentiment d’être dans l’errance dans mon travail. 



Laura Henno
La cinquième île
Exposition jusqu’au 16 janvier 2013

Galerie Les filles du calvaire 
17, rue des Filles du Calvaire
75003 Paris

1 commentaire:

Gaëlle a dit…

Super cette interview de l'artiste, merci. J'ai particulièrement apprécié son travail que j'ai vu à la Galerie Les filles du calvaire il y a quelques jours.